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Ferrari 812 Competizione

Le monde de l’exception automobile vient d’ajouter un membre. Il nous vient tout droit d’Italie, développé sur le circuit de Fiorano.
Voyez-vous de quelle marque je parle ?
Gagné, c’est Ferrari.

Une nouvelle supersportive est toujours un événement. Quelle puissance va-t-elle proposer ? Quelle masse ? Quelle carrosserie ? Pour combien d’argent ? Mais quand on parle d’une GT à moteur avant de chez Ferrari, on préfère se souvenir de toute la lignée pour se dire que la marque n’a pas droit à l’erreur. A vrai dire, les premières Ferrari étaient à moteur avant, aussi on peut dire que la 812 Superfast actuelle est l’arrière-arrière-arrière-arrière – rajoutez-en encore – petite fille de la 250GT, qui connut bien des versions, comme GTO, Berlinetta Lusso entre autres, dessinées par Pininfarina. Dans les années 2000, les 550 et 575 Maranello étaient les représentantes de cette vieille famille.

Puis, elles furent remplacées par la 599 GTB. Même recette qu’auparavant : un V12 placé devant l’habitacle, la puissance aux roues arrière, la direction à l’avant. Elle connut une version délurée, ma Ferrari préférée pendant un long moment, la 599 GTO. La fibre de carbone s’est invitée un peu partout pour faire un magnifique contraste avec le rouge de la carrosserie et bien évidemment, pour faire baisser le poids à 1495 kg à sec. Totalement dépouillée, l’habitacle n’avait plus de tapis de sol, on voyait le métal directement. Le moteur développait une belle puissance de 670 chevaux qui permettait des accélérations décoiffantes avec un 0 à 100 effacé en 3,35 secondes et les 200 km/h accrochés en moins de 10 secondes ! Version ultime, la SA Aperta, fabriquée à seulement 80 exemplaires. Basée sur la GTO, elle a pour la particularité d’être cabriolet.

Totalement dingue, la 599 GTB fut remplacée, en 2012 par ma nouvelle Ferrari préférée, la F12 Berlinetta. Dernier dessin de GT à moteur avant signé Pininfarina, la F12 est une sculpture roulante. Encore une fois, c’est toujours la même recette, mais avec une touche de modernité et de classe supplémentaire par rapport à la 599 GTB. Les performances bondissent, naturellement. Puis, la version délurée arrive dès 2017. Son nom : tdf, pour Tour de France. Aucun compromis n’a été fait. La beauté de la F12 a été troquée au profit de la monstruosité qu’oblige la version tdf. Le son est incroyable, les performances tout autant. Le V12 propose 780 chevaux à 8250 tours/minute pour un 0 à 100 effacé en 2,9 secondes. En sus, elle apporte les roues arrière directrices, symbole de modernité et de technologie. Puis, vient la fin de la F12 Berlinetta. Adieu Pininfarina. 

La 812 Superfast déboule avec 800 chevaux, environ 1600 kg sur la balance, quatre roues directrices, propulsion, V12, tout va parfaitement. Le hic ? Par rapport à la F12, la bestialité a pris le pas sur l’élégance. Tant pis. A l’intérieur, le passager est enfin choyé, avec un écran devant lui où il peut voir les mêmes informations que le pilote. Ainsi, il n’est pas obligé de regarder le compteur devant le conducteur pour savoir à combien il roule, il n’a plus qu’à regarder en face de lui. Pratique. Pour la première fois depuis le début des GT à moteur avant siglées Ferrari, une version découvrable de série est commercialisée. Baptisée GTS, elle n’est en réalité qu’un « Targa », avec les deux arches qui restent derrière les appui-têtes. Plus désirable pour certains, elle ne me plaît cependant moins que la nouvelle arrivante. La GTO repoussait les limites de la 599, la tdf celles de la F12 tout en écrasant la GTO de 3 secondes sur le circuit de Fiorano. Alors qu’en est-il de la 812 spéciale ?

Déclinons d’abord sa carte d’identité. Nom : Ferrari ; Prénom : 812 Competizione ; Age : 3 jours ; Nationalité : Italienne. Un bon début. Comme il est de coutume chez Ferrari désormais, les versions spéciales n’ont pas le même nom que les anciennes. La version délurée de la 812 Superfast se nomme donc Competizione. Serait-elle faite pour la compétition ? A bien des égards, oui. Mais ce sera pour plus tard. Pour l’heure, intéressons-nous à l’extérieur. De la 812 Superfast originale, la Competizione ne conserve à l’avant que ses phares. Et encore, puisqu’ils perdent les ouvertures qu’ils avaient pour refroidir le moteur. Mais, si elle perd ces ouvertures, le moteur est moins refroidi ? Non, puisque le bouclier avant a été totalement remanié, avec une plus grande ouverture encore. Elle paraît énervée, prête à en découdre. Mais elle peut s’avérer très pratique en hiver lorsqu’il neige tant la lame avant semble sortir du pare-chocs. La plus belle déneigeuse du monde à coup sûr, à défaut d’être la plus efficace. Sous cet angle, la Competizione me paraît inspirée de l’Aston Martin Vulcan homologuée sur route. De ma plume, ce n’est pas un défaut, bien au contraire. Mais, dès qu’on regarde le profil, la filiation avec l’anglo-saxonne s’estompe dans mon esprit, pour revenir en Italie.

Vous ne trouvez pas qu’elle ressemble étonnamment – non pas vraiment étonnant – à la F12 tdf ? Une idée peut-être due à la ligne globale de la voiture, qui est quasi identique à la F12, et à la bande noire qui court sur toute la largeur du capot moteur. L’échancrure entre l’aile avant et la porte semble s’être agrandie elle-aussi, ou est-ce à cause du contraste du noir et du gris ? Aucune idée, mais l’agressivité gagne encore du terrain. Le profil n’a donc, en grande partie, pas beaucoup changé, alors que l’avant lui a été redessiné en très grande partie. Mais, attendez de voir l’arrière, vous verrez ce que c’est que de redessiner une partie de voiture.

De commun avec la 812 Superfast, il n’y a que les feux, comme à l’avant. Autrement, tout a été redessiné pour une meilleure efficacité. On n’en doute pas. Le dossier de presse avance que l’inspiration de cet arrière monumental vient de la P4, la voiture victorieuse au Mans. A bien y regarder, il y a peut-être un peu de P4 là-dedans. Une chose est sûre, l’arrière est agressif, bestial, monstrueux. Il est tellement fou que j’en perd mes mots. La partie vitrée de la 812 Superfast a été purement et simplement remplacée par un élément sans nul doute en fibre de carbone contenant quelques ouvertures pour guider l’air vers le spoiler, dessiné pour rappel en hommage à la P4. Si on retourne dans les années 2010, loin de ces histoires de pandémie, une telle absence de visibilité arrière a déjà été vue sur la Ferrari Omologata et la SP38, des éditions limitées elles aussi. Le système d’échappement, revu lui aussi, permet le dessin d’un nouveau diffuseur. Ainsi, les échappements prennent place de part et d’autre du diffuseur, qui prend presque 90% de la largeur de la voiture. Si avec ça, l’air n’est pas bien guidé et la voiture pas bien collée à la route…

Et les passagers, collés dans les baquets.

Sans surprise, l’intérieur perd en confort pour gagner en radicalité. A l’instar des enfants à la recherche des œufs dans le jardin le jour des Cloches, les ingénieurs Ferrari ont cherché les kilogrammes superflus. Pas le plus facile des jobs… Sauf que pour cela, ils ont eu encore une fois carte blanche. Aussi ont-ils redessiné le tunnel central qui fait office de mur de Berlin entre les deux sièges baquets. Aussi étonnant que cela puisse paraître, ces sièges me semblent confortables. J’attends les avis des professionnels quant au confort véritable de ces baquets, mais en comparaison avec ceux de McLaren, en fibre de carbone partiellement recouverts de bouts de mousse, je sais où mon cœur balancerait pour faire un long trajet. Cependant, j’ai l’impression que la chasse aux kilos n’est pas allée aussi loin que chez d’autre, puisqu’il reste toujours un porte-gobelet entre les sièges. Intéressant pour tous ceux qui mettent leurs canettes de soda ici.

Pour être franc, l’intérieur n’est pas aussi sidérant de monstruosité que l’extérieur, mais il vaut son pesant de cacahuète et nous assure une chose : on peut être deux dans une Competizione. Ce qui est déjà une bonne nouvelle. Bien sûr, l’habitacle est personnalisable à l’infini. Le jaune qui entoure le compte-tours, les aérateurs centraux, les baquets, peut être remplacé par du rouge, du noir, et bien d’autres couleurs. Le volant plein de boutons me donne envie de l’empoigner et de faire un tour avec lui. Ça me changera du volant de ma Clio…

Et les performances aussi !

Sur le papier, les données techniques semblent affirmer que la Competizione est faite pour la compétition. Le 0 à 100 km/h est expédié en 2,85 secondes, le double en 7,5, la course s’arrête au-delà de 340 km/h, vitesse ô combien respectable qui est atteignable presque nulle part. Le sacro-saint V12 atmosphérique de 6,5 litres de cylindrées dévoile ses 692 nm de couple à 7000 tours/minute et l’étendue de sa cavalerie à 9250 tours, en comptant 830 équidés. Une course contre l’aiguille qui atteint le rupteur à 9500 tours/minute. Il n’existe plus beaucoup de moteurs qui montent aussi haut dans les tours. Et dans une symphonie jouée par 12 cylindres placés selon un angle de 65 degrés…

Le moteur atmosphérique, en plus d’émettre un son à donner la chair de poule à des kilomètres à la ronde, permet une plus grande facilité d’utilisation et de prise en main. En effet, comme l’arrivée du couple et de la puissance est progressive, et très haut dans les tours, cela permet de voir venir la cavalerie, ce qui n’est pas vraiment le cas avec un moteur suralimenté tel qu’un V8 4.0 de chez McLaren, qui propose plus de couple à un très faible régime moteur. Et si jamais son propriétaire n’est pas aussi bon pilote que ses géniteurs, la 812 Competizione contient un nombre incalculable de programmes plus innovants les uns les autres. Mais la marque annonce un nouveau programme tout à fait révolutionnaire qui agit sur les roues arrière.

Comme la 812 Superfast, et la F12 tdf avant elle, la Competizione bénéficie d’une direction intégrale. En d’autres termes, les quatre roues sont directrices. De ce fait, l’entrée dans un virage demande un moins grand angle de volant que sans cette technologie. Avec la Competizione, les roues arrière deviennent indépendantes. Par exemple, la roue arrière gauche peut tourner selon un angle plus grand que celle de droite, ou inversement. J’imagine le nombre de cheveux blancs que les ingénieurs ont du avoir… Complexe à expliquer, sûrement complexe à mettre en œuvre, mais probant sur piste.

Forte de ses 830 chevaux, de ses 692 nm de couple et d’une masse de 1487 kg à vide, la 812 Competizione boucle le circuit de Fiorano, le circuit officiel de Ferrari, en seulement 1 minute et 20 secondes. A titre de comparaison, une 599 GTO avait établi un temps de 1 minute 24 secondes, et une F12 tdf 1 minute 21. Avec ce chrono, la Competizione bat la 812 Superfast d’1,5 secondes et se rapproche de l’hypercar LaFerrari, qui avait bouclé Fiorano en 1 minute 19 secondes et 7 dixièmes.

Comme un bon ostréiculteur qui vous met la 13ème à la douzaine, Ferrari nous « offre » la déclinaison décapotable de son coupé sculptural. Nommée Competizione A, pour Aperta, elle reprend la totalité du look de la Competizione, en adoptant un nouveau dessin entre les sièges et la partie arrière. Chacun se fera son opinion sur cette carrosserie que je trouve, cela n’engage que moi, moins plaisante à regarder que la Competizione coupé. Mais, j’avoue qu’entendre un V12 atmosphérique, cheveux au vent, cela doit faire quelque chose…

Des chronos à donner le tournis, un design spectaculaire, un aérodynamisme à toute épreuve, on pourrait réduire la 812 Competizione ainsi. Mais, à mon sens, elle paraît être bien plus. Ferrari l’a dit, le moteur atmosphérique vit ses dernières heures, et le V12 encore plus. Aussi, celui-ci est peut-être le dernier de son espèce. Dire que nos petits enfants n’entendront sûrement pas le son d’un V12 atmosphérique… Dès lors, ce temps à Fiorano est peut-être le symbole d’un dernier tour de piste pour le V12.

Par Iwen

Passionné d'automobile de toutes époques, je suis étudiant à l'ITM Graduate School au Mans, avec pour objectif de travailler dans le domaine de l'automobile.

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