
La folie des grandes marques semble être de l’histoire ancienne. Elles ne veulent plus perdre leur temps à développer des voitures à faible diffusion. Pour baisser les coûts, elles collaborent désormais entre elles. BMW et Toyota se sont liés pour développer conjointement la Z4 et la Supra MK5. Au Pays du Soleil Levant, la culture du drift se transmet de génération en génération depuis que la voiture existe. Sur le papier, le drift c’est simple : un angle de braquage suffisant pour tourner mais pas trop au risque de sous-virer, un grand coup d’accélérateur, et la voiture se met en dérive. Il suffit de jouer ensuite avec le couple volant-pédale pour élargir la dérive, ou revenir dans le droit chemin. D’une simplicité… sur le papier. Et s’il y a des reines pour le drift, ce sont bien les Supra au Japon et les BMW en Europe. Alors, que les deux marques travaillent ensemble, l’idée n’est finalement pas si mauvaise que cela…
D’autant plus que Toyota ne s’est pas contenté de laisser BMW faire de son côté. Pendant le développement du binôme, les Japonais ont travaillé sur le 6 en ligne S58 allemand pour mieux le comprendre. Ils l’ont forgé et renforcé pour qu’il soit capable de subir des modifications de la maison-mère mais aussi des préparateurs. Car la renommée du coupé nippon vient des préparateurs. À coup de turbos plus gros ou de pression plus élevée, la puissance du coupé augmente fortement, tout comme la difficulté de la conduite ! La discrétion n’intéresse pas ces préparateurs. Au contraire, pour montrer leur savoir-faire, ils n’hésitent pas à élargir les voies des voitures, ajouter du carrossage négatif, ouvrir le capot pour faire respirer le moteur ou encore installer un aileron plus gros… Le tout non pas pour la performance et l’appui dans les virages mais pour se démarquer, sortir du lot. Et Toyota l’a bien compris avec sa Supra MkV.


Par endroits, la carrosserie semble éventrée. Une coupure verticale au niveau des phares, une horizontale sur le capot, une autre en aval de la portière et une dernière terminant le dessin du feu arrière, tous ces éléments sont factices. Le plastique noir augmente certes l’agressivité et laisse présager une voiture bien refroidie. Leur présence n’est pas qu’une lubie de designer mais bien des metteurs au point. Les ouvertures sont placées de telle manière à ce qu’elles puissent être ouvertes au besoin. Toyota a ici pensé à ses préparateurs fidèles qui attendaient le retour de la reine depuis 17 ans ! Sur le plan du design, la nouvelle venue impose une rupture stylistique certaine. Les éléments sont là, avec un long capot qui oblige un habitacle rejeté sur le train arrière, mais les dimensions sont plus compactes qu’auparavant. Plus agressive, la Supra se la joue mini-GT, avec des faux-airs d’Aston Martin Vantage, notamment avec cette queue de canard à l’arrière. Alors, sur quel tableau la Supra veut-elle jouer, celui de la mini-GT ou de la reine du drift ?
Malheureusement, nous n’avons pu vérifier la deuxième partie de la question. En revanche, nous avons pu déceler quelques bons ingrédients. Avant de voir cela, attardons nous sur l’habitacle. Comme le moteur, la boîte et le châssis, il provient de… BMW. Le design de la planche de bord diffère entre les deux modèles, mais les boutons ou encore les écrans sont empruntés dans la banque d’organes bavaroise. Les personnes déjà familières de l’instrumentation BMW retrouvent leur marque rapidement, mention spéciale au sélecteur de vitesse, très ergonomique. L’écran, de taille que l’on pourrait presque qualifiée de modeste aujourd’hui, rappelle la vocation de la Supra. Il propose intuitivement de passer en mode Sport ou encore de désactiver les aides. Et accentue le fait que la meilleure place, dans un coupé sportif, est derrière le volant !


La position de conduite, au ras du sol, renvoie à sa voiture-sœur, le Z4. Loin, tout là-bas, le bout du long capot. Heureusement qu’il n’y a pas de trajet en ville de prévu… La largeur non plus ne rassure pas, et les rétroviseurs extérieurs n’aident pas. Ils ne renvoient que l’image des jolies ailes arrière de la Supra, très bombées. Si elles donnent du muscle au coupé, elles coupent surtout toute rétrovision ! Qu’importe, ce qui est important, c’est devant. Lorsqu’on ne la brusque pas, la Supra reste de marbre, apte à rouler des kilomètres sans broncher, ni vous casser le dos. Enfin, ça reste à voir sur une vraie longue distance, car le tarage des suspensions arrière semble rigide, trop même, pour une utilisation GT. Et comme on est assis sur le train arrière, ou presque. Pour le reste, la Supra se révèle être une bonne compagne. À allure stabilisée, la boîte de vitesses engage les rapports les plus élevés possibles, pour limiter les nuisances sonores du moteur. Lequel se fait, dès lors oublier. Pour ne pas devenir fou, il suffit d’augmenter le volume et d’écouter, via les enceintes JBL®, vos musiques préférées.
Ou sinon, vous pouvez augmenter le rythme. Auquel cas, la voiture saura répondre à vos attentes. Bénéficiant d’une répartition des masses à 50:50, la Supra a un équilibre de funambule… à condition de ne pas écraser l’accélérateur. Le risque étant de perdre la motricité du train avant, lequel se lève. Il faut les digérer les 500 nm de couple à 4.500 tours/minute ! Sans parler des 340 chevaux bien plus tard… Imaginez avec une puissance majorée ! En levant le pied, on retrouve de la motricité, et le train avant si directif et plaisant. Dans les enchaînements, et à condition de ne pas trop solliciter le fond de la pédale d’accélérateur, le train avant s’accroche aux virages. On en redemande ! Jamais, au grand jamais, l’arrière-train n’a décroché. En tous cas, avec les aides. Mais son équilibre et sa direction exquise, qui mériterait certes de remonter plus d’informations, laissent présager un comportement de drifteuse hors paire. Toutefois, quelques bémols subsistent. La boîte de vitesses est parfaite en utilisation classique, pour une GT. Mais dès que le rythme augmente, les passages sont plus difficiles. Elle ne sait jamais passer le rapport suivant. Et pas la peine de prendre le pouvoir avec les palettes, la boîte se refusera de passer la vitesse demandée… C’est d’autant plus dommageable qu’il s’agit-là de son seul vrai défaut. Nous passerons même sur la pédale de frein, au ressenti très artificiel et qui n’augure rien de bon lorsqu’il s’agit d’attaquer.


En mélangeant les ingrédients de la drifteuse parfaite et ceux de la GT idéale, Toyota nous livre ici une copie très intéressante. Confortable et précise, silencieuse et joueuse, son 6 en ligne représente la cerise sur le gâteau. Les limites sont si loin avec les aides à la conduite, et avec un simple mortel au volant, que la confiance s’installe très vite. Nous laissons les derniers mots à notre photographe, amateur de japonaises : « elle a la qualité de fabrication de BMW mais l’âme d’une Jap’ ». Tout est dit.
Une réponse sur « Toyota Supra MkV »
[…] Nismo ou non, ce petit coupé a l’air attachant. Si seulement il pouvait traverser l’Atlantique pour que nous puissions, enfin, savourer son tempérament de feu. Une sorte de rivale de la Supra. […]